Rubens Barrichello a accusé son équipe de sa décevante 6e place en Allemagne. Jenson Button s'est énervé, Ross Brawn a tenté de calmer le jeu mais le mal est fait.
"Si nous continuons comme ça, nous allons perdre les deux championnats, et ce serait terrible". L'avertissement est signé Rubens Barrichello. Qui aurait cru au soir du Grand Prix de Monaco et du troisième doublé des Brawn GP en six courses qu'un de leur pilote pourrait se sentir autant menacé six semaines plus tard ? A Silvertsone et à Nürburg, Jenson Button et son coéquipier brésilien ont marqué respectivement sept et neuf points, là où les Red Bull de Sebastian Vettel et Mark Webber en ont chacune inscrits dix-huit. "Rubinho" est désormais quatrième au classement général derrière les deux fusées autrichiennes, qui ont mis le cap sur le trône de Button à vitesse grand V.
Si les Brawn avaient affiché leurs lacunes dès les essais libres, vendredi, elles étaient parvenues à corriger le tir en qualification, dépassées uniquement par Webber. Et le début de course jouait en leur faveur avec le départ canon de Barrichello, ajouté au drive-through imposé à l'Australien. Là encore, qui aurait parié sur une sixième place de Rubens à l'arrivée ? "J'ai fait ce que j'avais à faire. J'avais à me porter en tête au premier virage et c'est ce que j'ai fait", commentait le Pauliste.
La stratégie à trois arrêts mise en place par Ross Brawn a coûté cher au vétéran du paddock, tout comme le problème d'embout de tuyau de ravitaillement rencontré lors du deuxième pit stop. "Ils m'ont fait perdre la course. J'ai juste envie de prendre l'avion et de rentrer chez moi. Je ne veux parler à personne dans l'équipe. Ce ne serait que beaucoup de "bla bla". Je ne veux pas de ça" , rajoutait-il dans une colère noire.
"Vous créez une histoire qui n'existe pas !"
"Ai-je assez d'essence pour aller au bout ?" avait-il questionné, après son deuxième arrêt. "Négatif" lui avait répondu son ingénieur. Mais d'aucuns avaient vu immédiatement dans cette réponse un subterfuge pour préparer l'inversion de positions avec Jenson Button, compatriote et préféré du boss, Ross Brawn. C'est pourquoi la troisième halte du Brésilien avait encore duré un peu plus que celle de l'Anglais, qui lui avait filé sous le nez de retour en piste. "L'équipe a montré qu'elle savait comment perdre une course aujourd'hui", s'est lamenté le vice-champion du monde 2002 et 2004. "J'ai eu deux problèmes aux stands" , a-t-il rappellé. Pour un manque à gagner de 6 secondes.
Déjà, à Montmelo, le vétéran sud-américain avait été passé de deux à trois arrêts quand son équipier s'en était tenu à deux stops victorieux. Il s'en était ouvert, et Button lui avait sèchement rétorqué que l'ordinateur de Brawn avait indiqué que trois arrêts était la meilleure solution pour le GP d'Espagne, disputé le 10 mai. Le Britannique avait omis de préciser qu'amortir trois ravitaillements exige de ne rencontrer aucun trafic...
"Si je finis par penser qu'il se passe maintenant la même chose qu'à cette époque... et bien je vaux mieux que ça" , a repris Barrichello. "Je suis très bon pour résoudre les problèmes, si c'est nécessaire. Je peux m'arrêter à la fin de l'année". De toute façon, c'est ce que dit son contrat.
Face à cette "montée dans les tours", Jenson Button a cette fois choisi les journalistes pour cible, qui penseraient toujours à mal. Evidemment, comme la Fédération internationale de l'automobile (FIA) interdit les consignes d'équipe, il ne viendrait jamais l'idée à une équipe de fabriquer de toute pièce un incident pour bricoler un résultat qui l'arrange. "Vous créez une histoire qui n'existe pas !", a lancé "JB". "Le tuyau d'essence n'a simplement pas fonctionné. Ensuite, Rubens n'avait pas le rythme en pneus durs. Et j'étais coincé derrière lui. Donc il a ruiné ma course aussi", a-t-il ajouté, pour faire passer la pillule. Il oublie surtout d'admettre qu'il s'est moins bien qualifié que son équipier, auteur d'un départ sensationnel. Et qu'il a avancé de façon unilatérale son premier arrêt car il était en détresse pneumatique. Bref, de la mauvaise foi !
Brawn calme (encore) le jeu
Au-delà de cette course, l'ire de Barrichello reflète le désarroi de toute une carrière. Du haut de ses 279 Grand Prix disputés depuis 1993, le Brésilien ne s'est imposé qu'à neuf reprises alors qu'il a possédé pendant longtemps la meilleure monoplace du plateau. Durant ses six années chez Ferrari, sous les ordres de... Ross Brawn, il a toujours été voué à la deuxième place derrière Michael Schumacher. Après deux années de galère chez Honda, le vétéran pensait bien terminer sa carrière en apothéose au volant d'une Brawn compétitive.
Force est de constater qu'il est une nouvelle fois muselé au rang de second couteau. Et que des pilotes comme Nico Rosberg (Williams) ou Robert Kubica (BMW), en fin de contrat cette saison, lorgne sur son baquet pour 2010. En Espagne, Barrichello avait déjà menacé Ross Brawn de raccrocher, sentant que Button était favorisé au sein de l'écurie. Brawn lui avait juré que non. Ces nouvelles déclarations à l'issue de la course montrent véritablement la cassure au sein des Blancs. Mais encore, le stratège britannique joue la carte de l'apaisement.
"Sur le coup de l'émotion, ces choses se passent. Rubens avait le 11ème meilleur tour en course aujourd'hui. Vous ne pouvez pas gagner une course, quelque soit la stratégie que vous avez, si votre meilleur tour est seulement le 11ème plus rapide. Ce n'est juste pas possible. Ce sont les faits", a déclaré le patron de Brawn GP avant de réaffirmer son affection pour le battu du jour. "Rubens est un membre très important de l'équipe. Il est resté avec l'écurie pendant des moments très difficiles, il a obtenu beaucoup de loyauté de l'équipe et ce n'est pas quelque chose qui sera détruit avec quelques mots frustrés après une course."
Tant d'un point de vue technologique qu'humain, Brawn GP sera attendu au tournant en Hongrie dans deux semaines. En 2006, Jenson Button y avait signé la première victoire de sa carrière, au volant de la Honda. Cette année, il y espèrera un renouveau. Les deux derniers Grand Prix ont vu son avance par rapport aux Red Bull sérieusement diminuer et un éventuel titre ne semble plus acquis d'avance. D'ailleurs, le Britannique a tiré un enseignement strictement cartésien de son week-end allemand : "Si Vettel avait gagné ici, ça aurait été une catastrophe". Leader du championnat du monde, Button compte encore 21 points d'avance sur Vettel. Un gouffre mais en même temps si peu à huit épreuves de la fin.
Eurosport - Damien SIMONART
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